Après une accalmie de soleil, de mer ou de montagne, la rentrée sociale, scolaire, universitaire, littéraire… sont au rendez-vous. Trier parmi le nombre incalculable de livres, nouveaux de 2013 ou anciens de 1321 et plus, qui nous font frémir d’émotion, de souvenir ou simplement ponctuer l’horloge du temps, est la mission du magazine L’ivrEscQ. Dans cette brocante d’ouvrages, pages jaunies par les acariens ou «blanchies» par les aspérités de l’actualité, on reste suspendu comme à une suite de la vie, face aux bouquins. On se questionne par un enthousiasme qui gicle de partout, que nous réserve les écrivains, ces baroudeurs de la verve ? On bouillonne à l’idée qu’on a envie d’ingurgiter tout ce qu’ils nous racontent. Et avec quel zèle ont-ils, tous, crayonné des feuillets de ces milliards d’ouvrage incrustés dans l’histoire de l’humanité ? On découvre tout : auteurs moqueurs, menteurs, charrieurs, consciencieux, abusés, abuseurs, prophètes, charlatans, en extase, en pleurs… Cependant, la tonalité de leurs vocables nous happe. Car on cherche quasiment un double rayonnement comme complément intense à son dessein. Selon Céline, les histoires inondent le monde, mais ce qui reste d’un livre c’est le style. Aujourd’hui les livres se comptabilisent par leurs histoires ou leurs dénonciations surréalistes.
Par les livres et tous les moyens d’affranchissement, on s’interroge, dans ce bric-à-brac du progrès humain, comment franchir le seuil de la liberté, de la poésie, des quêtes sur un plancher façonné de calcul. On aime les chiffres. On atteint presque l’extase par les chiffres. Tout le socle de l’histoire de l’homme repose sur la comptabilité. On calcule par des chiffres embellisseurs. Pathologiques. Quémandeurs.Demandeurs. Cet autre, pathétique, souffre du petit chiffre. Il titube de manque du zéro dans son nombre comme un alcoolique manquerait de sa boisson. Parenthèses nuancées par les passionnés de l’art et des lettres qui, eux, loin de l’arithmétique, se demandent par des mots résistants ou fragiles, pourquoi contemple-t-on un soleil couchant sans le voir ? Ou pourquoi rase-t-on les arbres séculaires pour installer le béton ?
Seulement, on tape comme un sourd sur son clavier comme si on alerterait le monde d’une éminente catastrophe, or le monde d’après Tolstoï, si l’homme pouvait apprendre enfin à ne pas penser d’une façon aussi tranchante… s’il pouvait finir par comprendre que toute pensée est à la fois juste et fausse.
Néanmoins, restons dans ce constat culturel où gravitent le grotesque et l’arbitraire. Restons dans la mare de la littérature. La nôtre est là. Qu’elle soit feraounienne, dibienne, katebienne, djebarienne, amrouchienne… nous y revenons ré enchantés par ce soubassement qu’est le nôtre. Aussi, nous accordons une place de prédilection à la littérature universelle. Et celle qui nous concerne qu’on le veuille ou pas, c’est la littérature hexagonale : Aragon, Flaubert, Hugo, Balzac, Duras… Et même les plus récents tels que Sollers, Nothomb, Levy, même si ce dernier est à prendre avec des pincettes par les puristes. Quant à, nous, notre verve livresque suffoque par un mutisme, voire par un patinage dans la gadoue, sans nom. Pardi ! Bey, Zaoui, Ayyoub, Mokhtari… se comptent sur les doigts d’une main. Rien ne se passe ! La relève ne se pointe aucunement à l’horizon. L’ivrEscQ fait depuis cinq ans, déjà, le bilan des livres et des auteurs pour leurs utilité et leurs causes. Nonobstant la géométrie des frontières, j’ai souvent suivi mes goûts et mes attaches pour tel ou tel livre d’ici ou d’ailleurs. Mon dernier coup de cœur est Ibrahim et les fleurs du coran d’Emmanuel
Schmitt. Un livre qui réconcilie le monde dans toute sa différence. Un adolescent juif adopté par un père spirituel, soufi. Toutes les confessions sont en accord sans excès, ni rejet. C’est un livre qu’on lit en une après-midi sur son stransat, et on ressort revigoré par la simplicité additionnée à l’intensité, le clair-obscur. Rien n’est important que la vie elle-même. Sacré Schmitt qui réajuste les cordes du violon en atténuant le bruitage du fatalisme.
Nous y reviendrons sur Schmitt dans nos prochaines éditions. Dans ce numéro, nous voyageons avec Seamus Heaney et ses compères irlandais. Djoher Amhis pour Le chant de la sitelle. Haider, par Denise Brahimi, pour Virgurles en trombe dont nous avions déjà parlé. Nous avons choisi un extrait poignant de Benamar Médienne, à lire et à relire. Sans oublier le dossier concocté par Michel Georges Bernad sur un grand artiste peintre, Mohamed Aksouh.
Je vous souhaite bonne lecture par cette sentence de Gœthe, il n y a que les gueux qui soient modestes, il faut regarder par la majesté de l’histoire.
n.sebkhi@livrescq.com
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