Hakim Beddar est un fils de Diar el-Mahçoul, la cité de la Promesse tenue, la cité des espoirs de Pouillon, la cité qui regarde la baie d’Alger du haut de sa crête et dans l’éblouissement de ses journées. Peut-être est-ce voulu, peut-être que le hasard n’est plus un hasard mais le destin ? Lequel frappera à la porte du jeune Hakim. Et quelle destinée ! Celle d’un jeune homme qui verra le jour, en 1962, au cœur de cette ville miniature. Il est partie intégrante de sa fibre de pierre, il a usé ses semelles sous les grands portiques se dressant telles des colonnes de l’espérance, il est l’un de ces chevaux conduits par Neptune, l’oeuvre gigantesque de Louis Arnaud et qui firent l’orgueil des centaines d’habitants et qui, aujourd’hui, regardent Bab el- Oued du haut de leur croupe indomptée.
Ainsi, cette destinée n’est pas sans être estampillée par l’art laissé par les hommes, lui ouvrant l’esprit vers ce qui sera, dorénavant, son «cheval» mahçoulien : les arts plastiques précédées d’études de scénographie à l’Institut national d’Art dramatique de Bordj el-Kiffan (1985-1900) après lesquelles, il fera ses premiers pas dans la réalisation de décors théâtraux.
Il n’est pas un artiste du vide, il emprunte à l’espace tout ce que celui-ci peut offrir pour en faire une matière vivante, parlante, travaillée dans le relief et la gravure, dans le graphein –comme il l’indique– il joue avec les signes musicaux via Robert Schumann, avec les silhouettes dont il fera une merveilleuse Maternité, il chantera à sa manière le verbe de Victor Hugo, il donnera du relief à ses «corps inachevés». Il est une fourmi créatrice, laborieuse, il revient sans cesse sur ses matrices, il est exigeant et il exige beaucoup de lui-même et, pour cela, il travaille avec les meilleurs comme en France et avec l’artiste français J-C Berlioz-Arthaud notamment. Au-delà, il va plus loin et c’est un foisonnement de lithographies, d’expositions personnelles, de travaux sur des œuvres comme Poésies Kabyles, des poèmes choisis du barde Si Mohand ou Mhand ou ce recueil inoubliable de Louis Aragon, Les yeux d’Elsa, et, tout récemment, un livre d’artiste avec des gravures originales en hommage à Albert Camus auquel L’ivrEscQ a consacré son numéro de décembre 2013, en commémoration du centenaire de l’écrivain. Et quand bien même la mort a-t-elle frappé de ses ailes obscures bien des esprits créateurs, Hakim Beddar continuera sur d’autres rives son chemin sillonné de semences inspiratrices et inspirées…
«Peindre» et «écrire»
En 2000, en visitant les Roches de Condrieu dans l’Isère (France), Hakim Beddar découvre un atelier de gravures, de lithographies, de livres d’artistes dirigé par J-C Ber-lioz-Arthaud. Dans cette ancienne imprimerie, datant de 1870, subsistaient de vieilles odeurs d’encres. Cet atelier aux presses de plus de 200 ans, a accueilli régulièrement ces dernières années des artistes connus et moins connus comme Maurice Der Markarian, Jean–Marc Scanreigh, Jean-Gil Badaire, Jean-Jack Barois, pour l’impression de lithographies, de gravures et de livres d’artistes. L’édition des œuvres était limitée de 5 à 30 exemplaires.
Hakim Beddar réalisera lui aussi quelques éditions de lithographies, de gravures et un livre d’artiste avec J-C. Berlioz-Arthaud. L’artiste français travaillait avec une vieille presse à bras (la bête à cornes) pour réaliser des lithographies et il demeurait le dernier lithographe en Isère, un des métiers que les progrès techniques ont rayé de notre mémoire, remplacé par l’offset.(…)
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