Très tôt, le théâtre fut présent dans la vie d’Emmanuel Roblès et –il le dit lui-même dans
Camus, frère de soleil (Le Seuil, 1995)– c’est sous ce signe qu’en septembre 1937, il fit à Alger la rencontre d’Albert Camus, qui marqua toute son existence et sa création. Car parler
d’Emmanuel Roblès et le théâtre, c’est aussi évoquer le théâtre d’Emmanuel Roblès, qui
constitue peut-être la meilleure part de son œuvre, en tout cas la plus connue.
Spectateur fidèle de représentations théâtrales dès son plus jeune âge à Oran, Emmanuel Roblès fut, à son arrivée à Alger, passionné par les expériences nouvelles qu’il y découvrit, auxquelles il participa lui-même quelquefois : Le Profane, journal potache qu’il animait à l’Ecole Normale de Bouzaréa, présente déjà quelques saynètes de style farcesque.
Quelques années plus tard, Roblès, soldat à Blida, se déplaçait dès qu’il le pouvait à Alger pour y assister aux répétitions du Théâtre de l’Equipe d’Albert Camus, qui avait remplacé le Théâtre du Travail. Il y fit des découvertes déterminantes : celles du théâtre de Cervantès, de Synge par exemple qu’il adaptera lui-même plus tard à la scène, et des rencontres utiles, avec Blanche Balain ou Louis Foucher, etc. Dès 1941, il écrit une première pièce, Ile déserte, virulente critique, sur un mode farcesque, de l’administration coloniale. Appréciée par Albert Camus qui conseille dès lors à son ami de «s’essayer au théâtre», elle ne sera publiée qu’après la Libération dans la revue que dirige à Tunis Claude Bénady, un ami de Roblès.
Très progressivement, à partir de son retour au pays à la fin de la guerre et dans les milieux de Radio-Alger où il travaille comme critique littéraire, Roblès s’intéressant à l’histoire du genre en Algérie, s’intègre au mouvement du théâtre populaire qui s’y développe. Lié d’amitié avec Djelloul Bachdjarah et Mahieddine Bachtarzi, pionniers du théâtre algérien, il fonde une troupe de théâtre populaire, le Théâtre de la Rue, avec ses collègues Jean Kerchbron, futur réalisateur à la télévision française, et Paul Grandjean, professeur et comédien amateur. De 1946 à 1958, leur troupe, composée d’Algériens, d’Espagnols, de Français, créera des pièces de Molière, Tchékhov, Mari-vaux, André Roussin, Federico Garcia Lorca, Claudel, John Synge, effectuant des tournées à travers l’Algérie et remportant plusieurs prix de théâtre amateur en Algérie et à Paris.
C’est dans ces conditions que sont créées par le Théâtre de la Rue deux comédies en trois actes écrites par Emmanuel Roblès : L’Etrange immeuble de la rue Marconi (publication dans le revue Simoun, n° 5-6, 1953 et réédition en 1958 aux éd. du Seuil sous le titre L’Horloge) et Porfirio (éd. en 1958 dans le même ouvrage), créée en arabe par Mahieddine Bachtarzi, et en français, beaucoup plus tard, en 1982, sous forme d’un spectacle de marionnettes, par mon ami Bernard Gauthier et le Théâtre Populaire du Midi.(…)
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