L’ivrEscQ : Vous avez à votre ac-tif plusieurs livres témoignages. Vous racontez un temps, celui de notre nation. Est-ce le travail d’un historien ou est-ce alors l’écriture qui vous anime en quelque sorte, un exutoire, vu votre parcours du commencement de notre révolution à ce jour ?
Ali Haroun : En fait, durant la guerre de libération, j’ai été un acteur de l’Histoire de l’Algérie. J’ai vécu cela, d’ailleurs tout comme ces acteurs que vous interviewez, ayant écrit des livres témoignages, que vous passez dans le magazine L’ivrEscQ à travers vos rubriques. Nous sommes des témoins et des acteurs encore vivants. Prenant Fernand Iveton, par exemple, que je vois à la une du magazine, je ne l’ai pas connu personnellement, mais j’ai vécu son arrestation, son jugement, son exécution. J’ai connu le drame et la tragédie d’une guerre. Nous avions vécu des événements importants. C’était notre temps. Pour ma part, le hasard a joué énormément pour que je vive des dates inscrites en encre rouge de l’Histoire. Je me trouve en 1956 en contact avec Mohammed Lamine Debaghine, Ahmed Ben Bella, Mohamed Boudiaf. Ce dernier me charge de diriger le premier journal clandestin «Résistance». Il était publié au Maroc, rédigé par les Algériens.
L. : Cependant, vous évoquez Boudiaf, Abane Ramdane, Yveton, et tant d’autres, vous êtes tout de même au coeur de l’histoire… à quel moment vous avez senti le besoin d’écrire vos ouvrages ?
A.H. : En fait, je n’ai pas fait le travail de l’historien qui lui prend, par contre, du recul par rapport aux événements et passe au crible ses recherche, ses thèses, antithèses etc., mon besoin ne s’était pas ressenti pendant la guerre. Seulement, juste après notre indépendance, lorsque le peuple algérien avait acquis sa liber-té, sa dignité, la joie était fulgurante, éclatante. Quant à nous membres du comité fédéral à Paris, nous étions en crise. Nous avions vécu à Tripoli, mai/juin la cassure du FLN. La difficulté était là. Nous savions que cette joie n’allait pas être totale. Nous savions qu’on allait vivre des crises. Evidemment, cette douleur muette, me pousse à prendre des notes. Comprendre l’aspect occulté. Le moment opportun j’ai sorti cela, et encore une fois, l’histoire du hasard se pointe à moi. J’écris. Je jauge. J’évalue. Je reprends et les livres viennent. Les publications s’ensuivent… je raconte tant de détails importants. Des détails m’ayant marqué. Vous savez, puisque j’évoque le hasard et parfois même la chance d’avoir croisé des personnalités importantes, j’ai vu en Abane un Chef de maquisard, un visionnaire. J’étais sensible à lui, à ces responsables du FLN. Ils avaient une vision du futur. L’organisation de toute la communication du FLN. Il voulait réunir les 3 journaux. L’un était diffusé à Tunis, l’autre à Tétouan, et le troisième à Paris. Chacun était différent de l’autre. La ligne était la plateforme du congrès de la Soummam. Octobre 57, on crée le Journal El Moudjahad, une seule voix du FLN, journal tiré sur rotative. J’étais responsable de Résistance, et Abane responsable pour El Moudjahad. Nous étions une bonne dizaine sous la direction de Abane à l’exemple de Frantz Fanon, Rédha Malek, Mohamed El Mili et autres. J’ai eu la chance, mais surtout la responsabilité de vivre intensément le devoir de la patrie. Et donc, du mois d’Août à février de 57 à 58, on me demande de me rendre à Madrid. On me demande d’y rester et attendre les ordres. Et donc, dans mes livres, des moments forts de ma vie, de mon combat, sont évoqués. On y reviendra si vous le voulez pour plusieurs entre-tiens que chaque livre raconte. Là je souhaite juste vous évoquer la genèse de ma venue à l’écriture.
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